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Greffière : Reportage sur le terrain

Jeudi 14 janvier 2021

Lisa a 35 ans, elle est greffière au service d’instruction dans un Tribunal Judiciaire des Haut-de-France. Après un master en droit pénal et sciences criminelles, elle passe le concours de greffier en 2012 et intègre ensuite l’Ecole Nationale des Greffes. Un parcours qu’elle a suivi pour son intérêt des affaires criminelles et des enquêtes policières. Elle répond à nos questions.

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photo tribunal de Béthune, dans le bureau d'une greffière

« Faire avancer la vérité pour les victimes est l’une des plus grandes satisfactions »

Que vous inspire le mot « juste » ?

Le mot « Juste » m’inspire d’abord la notion de ce qui doit être fait, de ce qui doit être suivi. La justice, c’est ce qui est fondé. Sur le fronton de ma fac, il y avait une maxime : « que la justice soit forte, que la force soit juste ».  Je crois que c’est ce qui m’anime toujours au quotidien.

Une phrase pour expliquer ce qui vous a conduit à choisir votre carrière ?

J’étais intéressée par trois concours après mon master : greffier, lieutenant de police et avocat. Les trois dans le même secteur du respect des lois. J’ai réussi le concours de greffier, mais ce métier est multiple : ce n’est pas du tout la même activité suivant si l’on travaille aux affaires familiales ou au service des scellés. Pour ma part, je souhaitais vraiment travailler au service de l’instruction judiciaire. L’instruction, c’est une enquête judiciaire approfondie sur un crime ou délit, confiée à un juge-enquêteur : le juge d’instruction. Le greffier travaille en binôme avec le juge d’instruction ; cette relation de confiance entre le juge et « son » greffier est primordiale.

Quelques mots pour expliquer l’utilité de votre métier ?

Notre métier est tout simplement indispensable au bon déroulement des procédures. Nous sommes les partenaires des magistrats pour tous les actes et nous sommes les interlocuteurs des justiciables pendant les procédures. Les justiciables ont rarement les magistrats au téléphone, le greffier renseigne sur les procédures, sans influencer bien-sûr !

Un moment éprouvant dans votre carrière ?

A l’instruction, les dossiers sont souvent très difficiles. On vit avec les histoires des gens, on est présent aux interrogatoires et aux auditions. On est en première ligne pour recevoir la souffrance humaine. Il y a un dossier de disparition d’enfant qui m’a particulièrement marquée. Dans ces moments-là, le dialogue est essentiel et la bonne entente avec son juge est vraiment nécessaire pour pouvoir en parler. On est soumis au secret de l’instruction : hors de question d’en discuter avec sa famille ou son entourage ! On s’endurcit avec le temps, mais le cloisonnement vie professionnelle / vie privée n’est pas toujours évident.


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Des souvenirs positifs depuis que vous exercez votre métier ?

Faire avancer la vérité pour les victimes est l’une des plus grandes satisfactions que l’on puisse avoir. Les satisfactions restent cependant très personnelles puisque dans ces affaires-là - où l’on touche à la misère humaine -, on ne reçoit pas de retours positifs directement des gens. Mais, par exemple, voir un suspect reconnaître son acte alors qu’il le niait auparavant, c’est quelque chose de fort !

Une rencontre professionnelle qui vous a marquée ?

J’ai en tête le premier magistrat avec lequel j’ai pu travailler. Puis, tous les juges successifs qui ont suivi. On travaille ensemble quasiment 7 jours sur 7 et on passe plus de temps au travail qu’avec nos conjoints respectifs… Une bonne entente est donc fondamentale !

Vos retours sur le fonctionnement de votre service durant la période de crise sanitaire ?

Nous sommes un service qui ne ferme jamais. Durant le premier confinement, nous étions présents par roulement pour gérer les urgences : tous les évènements nécessitant la saisie d’un juge. Aujourd’hui, nous travaillons pour rattraper le retard. Les gestes barrières sont mis en place dans la juridiction, mais nous fonctionnons comme habituellement.

Un conseil à donner à des jeunes professionnels ?

C’est un métier où il faut croire à ce que l’on fait. Il faut le choisir parce qu’on adhère à des valeurs et qu’on croit à un système institutionnel. C’est un travail où l’on fait avancer la justice de manière administrative. On résume souvent le métier de greffier à un métier de bureau un peu plan-plan. Mais en arrivant le matin, j’ai beau planifier ce que j’ai à faire, il y a toujours un imprévu. Chaque jour est différent de la veille. Personnellement, j’aime vivre dans un service qui bouge et où il faut souvent parer à l’urgence.


Un autre regard sur le métier

A 44 ans, Sébastien est greffier au service des affaires familiales. Après un parcours atypique - une licence de géographie et des emplois d’éducateur pour l’éducation nationale -, il rejoint la justice en 2006, d’abord comme assistant administratif au conseil des prud’hommes à Paris, puis comme greffier aux affaires familiales en 2013. Passionné d’informatique, il est également correspondant local informatique suppléant pour son tribunal judiciaire.

« Dans nos métiers, il y a toujours énormément de dossiers papiers. Ma directrice de greffe a lancé un chantier de dématérialisation dans nos services et nous avons débuté avec la numérisation de la procédure pénale. C’est un chantier sur lequel je me suis beaucoup investi. Cette numérisation est déjà en place pour tous les services sociaux d’aide à l’enfance, nos décisions sont désormais notifiées par mail. On gagne en temps et en efficacité ! C’est un projet sur lequel je suis fier d’avoir travaillé, car sur des postes de greffiers, très souvent multitâches, pouvoir optimiser permet de ne pas subir le travail. J’aime aussi pouvoir me dire que je participe à une certaine modernisation de notre métier. »

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