D.D.A.R.J : Reportage à la Cour d'Appel de Reims
" Tombé dans le droit par hasard, Pascal Cernik est Directeur délégué à l’administration régionale judiciaire à la Cour d’appel de Reims depuis 7 ans. Cette mission, qui prolonge son parcours de greffier puis de directeur des greffes, lui donne l’opportunité de servir la justice tout en fédérant son équipe au quotidien. Rencontre avec un inconditionnel du collectif. "
" Au coeur de l'action "
Que vous inspire le mot « juste » ?
Être juste c’est, en premier lieu, me montrer équitable à l’égard de tous les agents que j’encadre, sans faire de différence d’aucune sorte. Ensuite, c’est être approprié dans les décisions que je prends. J’entends par là savoir les adapter à la personne et à la situation. Enfin, il faut rester authentique. Le naturel revient toujours : autant l’assumer !
Pourquoi avoir choisi cette voie ? Quelles sont les valeurs qui vous guident ?
Après un baccalauréat littéraire, je me destinais à être professeur de lettres ou de philosophie. Un jour, après avoir vu par hasard une affiche « Devenir greffier », j’ai eu envie de bifurquer. Après un cursus de capacité en droit, j’ai passé le concours et intégré l’École nationale des greffes en 1989. C’est là qu’a commencé mon parcours judiciaire ! Greffier de 1990 à 2002, j’ai ensuite évolué comme directeur de greffe afin d’encadrer une équipe.
C’était l’occasion de mettre en pratique les valeurs auxquelles je crois : le sens du collectif, l’écoute et le goût du dialogue. Pour moi, le management est collaboratif par essence ! J’accorde beaucoup d’importance à la qualité des rapports humains, à la considération de chacun, au respect mutuel. Lorsqu’un collaborateur rejoint le SAR, je cherche d’abord à le connaître par moi-même pour me forger ma propre opinion. Je ne prends connaissance des évaluations que dans un second temps.
Un souvenir marquant de votre parcours ?
C’est l’affaire dite « des paillotes » sur laquelle j’ai travaillé auprès des juges d’instruction chargés du dossier au Tribunal de grande instance d’Ajaccio. J’ai eu la chance de la suivre du début à la fin et dans tous ses aspects – procédure, perquisition, enquête… C’est une expérience professionnelle inoubliable et passionnante !
Inversement, un moment éprouvant ?
J’ai perdu deux collègues au cours de ma carrière. La première s’est donné la mort, ce qui m’a profondément ébranlé. Pour le deuxième, le décès est intervenu subitement en 2018. La difficulté était qu’outre de gérer ma propre peine, il fallait annoncer, en relation avec mon homologue directeur de greffe, cette terrible nouvelle aux collègues et aider à mettre en place l’accompagnement psychologique nécessaire pour les soutenir face à cette épreuve.
En tant que directeur du SAR, que retenez-vous de la crise sanitaire ?
Cela a bien sûr été compliqué car, au début, nous manquions de tout, notamment de masques. Toutefois, outre la mise en place des Plans de continuité de l’activité (PCA) sur l’ensemble du ressort, nous menions depuis trois ans une politique d’acquisition d’ordinateurs portables, permettant de travailler à distance. Au SAR, pendant le premier confinement, j’étais seul en présentiel, en lien avec les chefs de cour et les agents de mon service.
Ce que je retiens avant tout est l’engagement inaltérable de chacun pour remplir sa mission en dépit des grandes difficultés, le dialogue social permanent sur le ressort et le sens de la solidarité dont magistrats et agents ont fait preuve. C’est grâce à eux que la justice a continué de tourner !
Quels sont les qualités clés pour exercer votre métier ?
L’anticipation d’abord pour identifier les besoins et proposer des solutions, humaines, budgétaires ou organisationnelles. L’adaptation ensuite : le directeur du SAR doit savoir s’ajuster aux méthodes des chefs de cour successifs qu’il assiste. Troisième qualité et non des moindres : la disponibilité. Être dans une tour d’ivoire n’est pas une option pour moi. Ma porte est et restera ouverte. Prendre le temps d’écouter chacun n’empêche nullement de décider !
Un conseil pour de jeunes professionnels ?
Savoir rester soi-même. C’est l’authenticité que j’évoquais au début de notre échange. Le corollaire est l’humilité. Je l’ai souvent constaté : l’expérience de terrain est indispensable. Quand on est un jeune diplômé, il ne faut surtout pas se priver d’apprendre auprès de personnes d’expérience !