contact
Prévention
Santé

Comment prendre soin de ses reins ?

Jeudi 14 décembre 2023

En France, 5 à 6 millions de personnes souffrent d’une maladie du rein et risquent la destruction de ce petit organe, pourtant essentiel. Pour éviter d’en arriver là, il est important de s’informer sur les facteurs de risque de survenue de ces pathologies, mais aussi sur leur dépistage, car une prise en charge précoce permet de conserver ses fonctions rénales plus longtemps.

Image
reins et gants bleu avec scanner

Silencieux et discrets, les reins n'en sont pas moins des organes essentiels au bon fonctionnement de notre corps. Logés sous les côtes, de part et d'autre de la colonne vertébrale — et non dans le bas du dos comme le laisse à penser l'expression "avoir mal aux reins" — avec leur forme de haricots, ils vont par paire. Ils mesurent environ 12 centimètres de hauteur, 6 centimètres de large et 3 centimètres d'épaisseur chez l'adulte pour 160 grammes chacun.

Des organes aux fonctions méconnues

Leur fonction la plus connue est l’élimination des déchets. Ils filtrent environ 1 800 litres de sang par jour et trient les résidus produits par l’organisme (comme l’urée, l’acide urique ou la créatinine) ainsi que les substances étrangères, dont l’accumulation serait toxique pour l’organisme. Mais les reins ont bien d’autres utilités. « Ils régulent et maintiennent l’équilibre en eau et en substances minérales (sodium, potassium, calcium…), explique le professeur Luc Frimat, président de la Société francophone de néphrologie, dialyse et transplantation (SFNDT) et chef du service de néphrologie du CHRU de Nancy. Ils produisent aussi plusieurs hormones, dont l’érythropoïétine (EPO) qui stimule la production des globules rouges, et la rénine qui participe à la régulation de la tension artérielle. Grâce à cela, les reins ont une position de “tour de contrôle” de l’organisme. »

Des facteurs de risque liés aux maladies chroniques

Mais parfois, cette belle machine s’enraye et la maladie rénale chronique (MRC) s’installe : les reins assurent de moins en moins bien leurs missions. « Même si ce sont des organes très résistants, les agressions dont ils sont victimes tout au long de la vie peuvent les abîmer », constate Luc Frimat. Certaines personnes sont par ailleurs plus à risques de développer une MRC : « c’est le cas des personnes diabétiques, de celles qui souffrent de maladies cardiaques ou vasculaires, et plus particulièrement d’hypertension, d’obésité, ou qui ont un parent qui a lui-même une MRC ou encore de patients qui prennent certains médicaments comme les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ou ceux administrés dans le cadre d’une chimiothérapie par exemple », énumère le professeur.

Heureusement, il est possible d’agir sur ces facteurs de risque. Il est ainsi recommandé de surveiller son poids, sa tension artérielle et son taux de sucre dans le sang régulièrement. Il faut également adopter les bons comportements au quotidien. « Avoir une activité physique régulière, limiter son temps sédentaire, adopter une alimentation équilibrée ou encore ne pas fumer sont les meilleurs moyens de garder des reins en bonne santé », rappelle le président de la SFNDT.

Dépister précocement une maladie silencieuse

Prendre en charge la MRC le plus tôt possible est aussi un enjeu important. Mais problème : elle est le plus souvent silencieuse. Le patient ne ressent pas de douleur (hors coliques néphrétiques dues à des calculs rénaux). « Ce n’est que lorsque le rein est détruit à 70 ou 75 % que les symptômes apparaissent, indique le spécialiste. Hypertension, œdèmes, prurit (démangeaisons), mauvaise haleine, fatigue, difficultés à s’alimenter, avec notamment un dégoût de la viande, en sont les symptômes. »

D’où l’importance du dépistage pour diagnostiquer précocement une MRC. « Il consiste en un examen sanguin qui permet le dosage de la créatinine sanguine et l’estimation du débit de filtration glomérulaire (DFG), c’est-à-dire la capacité des reins à éliminer les déchets de l’organisme, détaille Luc Frimat. La créatinine est un déchet produit par le corps et normalement filtré par les reins : si ces derniers fonctionnent mal, elle s’accumule dans le sang. Le second examen est une indispensable analyse d’urine pour rechercher et doser l’albumine, une protéine qui ne devrait pas y être présente. » Chez les personnes à risque (diabétiques, hypertendues ou obèses), il est préconisé de réaliser ce bilan complet une fois par an. « Mais 16 % seulement des patients concernés le font aujourd’hui en France (contre 66 % au Royaume-Uni) », regrette le néphrologue avant d’ajouter : « Ces patients ne doivent pas hésiter à le demander à leur médecin traitant ».

Un traitement précoce nécessaire

Image
reins illustrations

Les reins ne peuvent malheureusement pas guérir, mais il est possible de ralentir la progression de la MRC, voire de la stopper. « La prise en charge débute par une bonne hygiène de vie et une surveillance accrue des facteurs de risque, explique Luc Frimat. Nous avons aussi à notre disposition différents traitements dont des néphroprotecteurs et des médicaments anti-tension qui sont indispensables ou encore des gliflozines, une nouvelle catégorie de médicaments qui permet de ralentir l’évolution de la MRC. »

Dans les cas les plus graves, la fonction des reins est remplacée par la dialyse (lire encadré « Deux types de dialyse ») ou une transplantation rénale peut devenir nécessaire (lire encadré « Focus sur la greffe »). Chez les patients les plus âgés, où le bénéfice de la dialyse, en ce qui concerne la qualité de vie, n’est pas évident, un traitement conservateur actif peut aussi être proposé. Quelle que soit la solution choisie, le professeur Frimat insiste sur l’importance d’informer les personnes : « Un patient qui connaît bien sa maladie et qui est rassuré, peut agir et ainsi devenir acteur de sa santé. »

 

Deux types de Dialyse

Il existe deux types de dialyse. La plus connue est l’hémodialyse : une machine filtre le sang à travers une membrane artificielle afin d’éliminer les déchets, les toxines et l’eau en excès avant de le restituer au patient. « Elle nécessite de se rendre trois fois par semaine à l’hôpital », précise le professeur Luc Frimat, chef du service de néphrologie du CHRU de Nancy, avant d’ajouter : « Il est aussi possible d’utiliser cette méthode à domicile, mais sa mise en place peut s’avérer complexe et seuls 1 à 2 % des patients en bénéficient actuellement. »


Le second type est la dialyse péritonéale. Elle consiste à introduire par le biais d’un cathéter du liquide de dialyse dans la cavité péritonéale – c’est-à-dire dans l’espace entre le péritoine pariétal, la membrane qui tapisse les parois de l’abdomen, et le péritoine viscéral, qui recouvre les organes. Le liquide se charge alors des déchets et de l’excès d’eau qui sont ensuite drainés par le cathéter. « Cette technique présente l’avantage d’être simple et facile à mettre en œuvre à la maison, mais elle est encore peu répandue, puisqu’en France, elle est utilisée chez 7 à 8 % des patients contre plus de 15 % dans plusieurs pays européens », constate le professeur.

Focus sur la greffe

La greffe de rein est la solution de dernier recours pour les personnes qui souffrent d’une insuffisance rénale. Elle est notamment possible grâce aux dons de personnes décédées. Il faut noter qu’il n’y a pas de limite d’âge pour ce type de don et qu’il est important que chacun fasse connaître à ses proches sa volonté ou non de donner ses organes.

« En effet, en France, le taux d’opposition au don est encore trop élevé : 35 % versus 15 % en Espagne », déplore le professeur Luc Frimat, néphologue. En 2022, 3 376 greffes de rein ont été réalisées, dont 511 à partir de donneurs vivants (soit 15 %), selon les chiffres de l’Agence de biomédecine. Le Plan ministériel pour le prélèvement et la greffe d’organes et de tissus prévoit d’augmenter la proportion de greffes rénales réalisées à partir d’un donneur vivant afin d’atteindre 20 % en 2026. En France, la loi prévoit que le donneur vivant soit majeur, volontaire et en bonne santé. Il peut être un parent (au sens large du terme) ou toute personne apportant la preuve d’un lien affectif étroit et stable depuis au moins 2 ans avec le receveur.


Plus d’informations : Dondorganes.fr.